Madame
Barbara
Je reçois, à l'instant où je rentre chez moiVotre missive bleue, Madame.Vingt fois je la relis, et mes yeux n'y croient pas.Pourtant, c'est écrit là, MadameEt de votre douleur, je me sens pénétréeMais je ne pourrais rien, Madame.Vous savez, aujourd'hui, que de l'avoir perdu,C'est lourd à supporter, Madame.Vous demandez pardon de n'avoir pas comprisCe qu'était notre amour, Madame.Vous n'aviez que ce fils, vous aviez peur de luiEt vous l'avez gardé, Madame.Ne me demandez pas ce qu'a été ma vieQuand vous me l'avez pris, Madame.Je me suis toujours tu, ce n'est pas aujourd'huiQue je vous le dirais, Madame.Vous eussiez préféré, je vous retrouve là,Qu'il fût mort en héros, Madame.Oui, c'eût été plus noble, je vous crois,Que de mourir d'amour, MadameMais qu'il soit mort ici ou qu'il mourût là-bas,Auriez-vous versé moins de larmes ?Il en a décidé, lui seul avait le droit.Il faut vous résigner, Madame.C'est trop tard, maintenant, pour que je vous revienneEt vous vieillirez seule, MadameEt ne m'en veuillez pas si je parais cruelleMais je l'ai trop aimé, MadamePour qu'à la fin du jour, près d'une cheminée,Nous évoquions ensemble, Madame,Celui que, vous et moi, nous avons adoréEt perdu tout ensemble, MadameMais le chagrin m'égare, il faut me pardonner.J'ai mal de votre mal, MadameMais que faire, et quoi dire, puisqu'il s'en est allé ?Je ne puis rien pour vous, Madame.Pour la seconde fois, il va nous séparer.Non, je ne viendrai pas, Madame,Car, le perdre deux fois, c'est lourd à supporter.Vous me comprendrez bien, Madame.Je reçois, à l'instant où je rentre chez moi,Votre missive bleue, Madame.Vingt fois je la relis, et mes yeux n'y croient pas.Pourtant, c'est écrit là, MadameEt de votre douleur, je me sens pénétréeMais je ne puis plus rien, Madame.Vous saurez, comme moi, que de l'avoir perduC'est lourd à supporter, Madame...