Maria
Jean Ferrat
Maria avait deux enfantsDeux garçons dont elle était fièreEt c'était bien la même chairEt c'était bien le même sangIls grandirent sur cette terrePrès de la MéditerrannéeIls grandirent dans la lumièreEntre l'olive et l'orangerC'est presque au jour de leurs vingt ansQu'éclata la guerre civileOn vit l'Espagne rouge de sangCrier dans un monde immobileLes deux garçons de MariaN'étaient pas dans le même campN'étaient pas du même combatL'un était rouge, et l'autre blancQui des deux tira le premierLe jour où les fusils parlèrentEt lequel des deux s'est tuéSur le corps tout chaud de son frère ?On ne sait pas. Tout ce qu'on saitC'est qu'on les retrouva ensembleLe blanc et le rouge mêlésA même les pierres et la cendreSi vous lui parlez de la guerreSi vous lui dites libertéElle vous montrera la pierreOù ses enfants sont enterrésMaria avait deux enfantsDeux garçons dont elle était fièreEt c'était bien la même chairEt c'était bien le même sang.